Les spécialistes sont unanimes : l’éducation préscolaire est essentielle au bon développement des enfants. Pourtant, au Burkina Faso, la scolarité de la petite enfance manque encore cruellement de financement. Le projet Investir dans l’Éducation et la Protection de la Petite Enfance (IEPPE) mené par Action Education illustre néanmoins la réussite d’une coopération entre acteurs locaux, ONGs et pouvoirs publics.
Le préscolaire, parent pauvre du système éducatif
Au Burkina Faso, trois types de structures préscolaires se côtoient : les Centres d’éveil et d’éducation préscolaire (CEEP), structures formelles de l’Etat ; les bisongo, structures communautaires, et le privé qui occupe une place de choix dans les centres urbains. Les structures publiques ne représentent que 13 % de l’ensemble des structures du préscolaire (et le privé 72 %).
Pour l’année scolaire 2023-2024, the taux de préscolarisation était de seulement 6,9 %*. Plusieurs facteurs expliquent la faible place accordée à ce niveau d’éducation. De nombreux parents lui accordent peu d’importance et l’assimilent plus ou moins à de la garde d’enfants. D’autre part, le préscolaire est souvent perçu comme un luxe que seules les familles aisées peuvent se permettre. Même au niveau communautaire, certains parents trouvent que la contribution demandée pour la prise en charge des petites mamans, du gardien et du goûter n’est pas forcément justifiée. L'État ne fait pas mieux. En 2023, le budget de l’éducation préscolaire représentait 2%** du budget consacré au secteur de l’éducation.
Qu’est-ce qu’un bisongo ?
Un bisongo est un espace pédagogique géré par la communauté elle-même, qui accueille les enfants de 3 à 6 ans et les prépare au cycle primaire. Les activités qui s’y déroulent sont supervisées par un.e encadrant.e, que les enfants appellent affectueusement “petite maman” ou “petit papa”. En mooré, “Bissongo” signifie “enfant qui se sent bien dans sa peau”.
Le rôle clé des ONG : la contribution du projet IEPPE
Le projet dédié à la early childhood mis en œuvre par Action Education a permis la construction, la réhabilitation et l’équipement d’infrastructures dédiées à l’accueil des enfants. Cofinancé par la fondation Orange et la Fondation Michelham, le projet IEPPE a été mené en partenariat avec les autorités éducatives et les communautés des zones bénéficiaires. Il a considérablement amélioré les conditions de travail des animatrices et animateurs, mais aussi le cadre d’épanouissement des enfants.
« Action Education a construit un bâtiment comprenant deux salles de classe, un bureau et un magasin, ainsi que des toilettes. De plus, des équipements pédagogiques, du mobilier de bureau, ainsi que des jeux ont été fournis au CEEP », souligne la directrice du Centre d’éveil et d’éducation préscolaire (CEEP) de Kutian, Madame Eudoxie Sere. Le CEEP de Kutian n’est pas le seul à avoir bénéficié de ce renforcement en infrastructures. Neuf salles de classe, avec bureaux et magasins, ont été construites dans les localités de Sapouy, Cassou, Léo et Gogo. Par ailleurs, le projet a permis la réhabilitation de 12 salles de classe dans les communes de Cassou, Kombissiri et Gogo.
" Sans le projet IEPPE, le CEEP du secteur 5 n’aurait pas pu fonctionner. Le projet a été d’une aide précieuse : nous avons reçu des équipements et des manuels pédagogiques, ainsi que du mobilier, des tables et des chaises. Cela a grandement facilité notre travail. Les enfants ont reçu des cahiers d’activités et le bâtiment a été rénové ", déclare la directrice du CEEP du secteur 5 de Kombissiri, Madame Combari K., Alice Ela Sawadogo.
Dans la zone d’intervention du projet, on note une augmentation significative d’enfants préscolarisés. De l’année scolaire 2023-2024 à la suivante, une augmentation des effectifs de plusieurs structures préscolaires (CEEP et bisongo) bénéficiaires du projet a été notée. L’effectif des enfants préscolarisés a connu une augmentation de 7%. Pour autant, le nombre d’enfants qui demeurent privés d’éducation préscolaire demeure important. Pour le directeur du CEEP de Naliassan, Monsieur Moussa Sawadago, les actions menées dans le cadre du projet IEPPE “ont permis de réduire le coût de la contribution financière des parents facilitant ainsi l’accès à un grand nombre d’enfants de la ville de Sapouy.”
Le coût est un facteur déterminant dans l’adhésion des parents à l’éducation préscolaire qui n’est pas la priorité dans les niveaux d’éducation pour les populations. Sa gratuité serait primordiale pour l’adhésion massive. Mais cela à un coût et qui va le payer ? L’État et les collectivités territoriales sont-ils en mesure de la faire ? L’initiative du projet IEPPE est un exemple salutaire d’une synergie de tous les acteurs.
* Annuaire statistique du préscolaire 2023/2024 au Burkina Faso
**Ministère de l’Education Nationale de l’Alphabétisation et de la Promotion des Langues Nationales 2023