Lutter contre les tabous autour des règles au Bénin

28 mai 2022

Au Bénin, selon une étude, près d’une fille sur 7 ne va pas à l’école quand elle a ses règles. Pour limiter l’absentéisme qui fragilise la scolarisation des filles, Aide et Action accompagne 880 élèves dans la gestion de leur hygiène menstruelle, à travers un volet de son projet AGIR (Appui à la Gouvernance et aux Initiatives Relais).

De nombreuses filles ne sont pas préparées à l’arrivée de leurs premières règles, ce qui peut contribuer à une baisse de la fréquentation scolaire. Certaines abandonnent complètement la classe pendant cette période. « Il m’arrive souvent de manquer la classe quand j’ai mes règles parce que ma maison est loin de l’école. Je ne peux pas rentrer à la maison, me nettoyer puis revenir à l’école à l’heure. Dans mon école, il y avait seulement un bloc de latrines sales avec des herbes autour. Donc je porte ma protection hygiénique jusqu’au soir, parfois mon kaki (tenue scolaire) est tâché et mes camarades remarquent que j’ai mes règles. Pour éviter que tout le monde se moque de moi, je reste à la maison jusqu’à la fin des règles », témoigne une élève de CM2, de l’école primaire de Houinmin.

Une autre fille de 14 ans de l’école primaire de Gonfandji, en classe de CM2, ajoute : « La première fois que j’ai eu mes règles, j’étais en classe et la maîtresse m’a demandé d’aller au tableau. Quand je me suis levée, mes camarades ont commencé à se moquer de moi. C’est là que la maîtresse m’a remis son pagne pour que je l’attache sur mon kaki et m’a demandé de rentrer à la maison. J’ai eu peur et j’ai beaucoup pleuré. C’étaient mes premières règles, et ma mère ne m’avait jamais parlé de ça… ».

Une enquête sur la gestion de l’hygiène menstruelle en milieu scolaire réalisée par la Fondation Claudine Talon dans les communes d’Adjarra, d’Avrankou et de Porto-Novo au Bénin précise qu’environ 15 % des filles manquent les cours durant leurs cycles menstruels, ce qui correspond à 20 % du temps scolaire perdu sur une année. Les raisons qui poussent les filles à abandonner l’école lorsqu’elles ont leurs règles sont multiples : manque d’informations, stigmatisation, accès difficile à des infrastructure adéquates (toilettes, eau…), manque de moyens pour acheter des protections hygiéniques… Le risque est qu’elles n’arrivent plus à suivre les cours à cause de trop nombreuses absences et arrêtent alors complètement l’école.

La gestion du cycle menstruel a donc un impact sur la continuité éducative des filles. Le projet AGIR en a fait un volet essentiel pour contribuer à la réduction du taux d’absentéisme des filles dans 80 écoles primaires de 8 communes des départements de l’Atlantique et de l’Atacora. Les cibles sont constituées de filles des classes de CE2, CM1 et CM2, de mères et de personnes ressources (enseignantes, vendeuses dans le domaine scolaire…). 880 filles, 128 personnes ressources et 3 840 mères d’écolières ont été sensibilisées et formées à la bonne gestion de l’hygiène menstruelle. On explique aux filles ce que sont les règles et comment elles peuvent gérer leur cycle.

Ce volet du projet met l’accent sur trois aspects : la disponibilité d’infrastructures adaptées, la gratuité de serviettes hygiéniques réutilisables et l’accompagnement des personnes ressources. Les écoles qui ne disposent pas de toilettes non mixtes en sont dotées. Les écoles bénéficient aussi de points d’eau.  Les personnes ressources identifiées par les filles elles-mêmes sont formées à l’accompagnement de leurs filleules. 

« Pour l’avoir vécu, je comprends la pertinence de la mise en œuvre de ce volet du projet. L’implication des femmes de la communauté, des enseignantes que nous sommes a eu un effet positif sur la vie scolaire des filles de l’école de Golo-Djigbé », affirme Inès Katcha, enseignante en classe de CE1.

 

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