Présidentielle 2022 : des milliers d’enfants non scolarisés en France

Crédit photo : @Maria Symchych

Des enfants qui ne vont pas à l’école, on en entend surtout parler dans les pays dits en développement. Et pourtant, en France comme dans de nombreux pays dits développés, les enfants non scolarisés sont nombreux. L’hexagone en compterait à elle seule plus de 100 000 selon le collectif Ecole pour Tous. Parmi eux des enfants en situation de handicap, mais aussi une majorité d’enfants vivant en habitats précaires (bidonvilles, squats, hôtels sociaux, à la rue etc.). La France, de par sa constitution ou la Convention relative aux droits de l’enfant  qu’elle a ratifiée en 1990, s’est pourtant engagée à faire du droit à l’éducation une réalité pour tous les enfants en âge scolaire vivant sur son territoire sans condition, ni de nationalité ni de résidence

Dans les faits, on estime que 10% des enfants vivant en habitat précaire (squats, hôtels sociaux, hébergements d’urgence) dont une majorité d’entre eux habitant en bidonvilles ne sont pas scolarisés. Au-delà des difficultés de compréhension du système éducatif par les familles  liée à l’insuffisance des dispositifs de soutien pédagogique et  linguistique  qui leur sont proposés, ces enfants et leurs familles rencontrent également des  barrières administratives comme la domiciliation administrative ou la vaccination obligatoire notamment  qui freinent, voire empêchent leur scolarisation.  L’adoption du décret n°2020-811 du 29 juin 2020 (Loi pour une Ecole de la Confiance) qui devait faciliter l’inscription scolaire des enfants dans le premier degré en précisant les pièces justificatives nécessaires n’empêche pas aujourd’hui de nombreuses mairies de s’opposer encore illégalement à leur inscription. En Outre-Mer, en particulier en Guyane et à Mayotte, le taux de non-scolarisation reste aujourd’hui encore de 8 points supérieurs à celui de la métropole

Pour les enfants et les jeunes dont l’inscription scolaire est acceptée, un suivi individualisé de leur parcours scolaire et nécessairement régulier demeure indispensable même une fois intégrés dans le système scolaire pour y rester et suivre une scolarité normale. Cependant, leurs conditions de vie dans lesquelles ils évoluent et l’ensemble des contraintes administratives à l’école et en dehors pour leurs familles  restent des  obstacles majeurs à toute éducation de qualité : ils souffrent d’un manque d’accès aux services de base ( notamment à une cantine scolaire sur le temps scolaire , parfois à un accès à  l’eau potable et à des soins réguliers en dehors, à des temps d’études encadrés, aux loisirs et activités périscolaires) mais surtout ils subissent racisme, discriminations,  expulsions brutales et fréquentes qui les condamnent à être régulièrement déscolarisés sur de longues périodes. Comment dans ces conditions réussir à rester à l’école et à éviter le décrochage scolaire ? 

Partant de ces constats, Aide et Action interpelle les candidats et candidates à l’élection présidentielle 2022 pour mettre en place des mesures urgentes pour assurer un accès égal à l’école et des procédures d’inscription scolaire conformes à l’article 16 de la loi Pour une école de la confiance ainsi qu’un outil contraignant pour rappeler les obligations qui incombent aux maires sur l’instruction et l’obligation scolaire (en vertu du  décret n°2020-811 du 29 juin 2020). 

Comme le demande déjà de nombreux acteurs associatifs dont le collectif CNDH  Romeurope dont nous sommes membres, notre organisation soutient l’application d’une véritable trêve scolaire sur tout le territoire à l’image de ce qui se fait déjà sur certains territoires notamment dans le sud de la France : cela permettra notamment de suspendre toute expulsion d’un lieu de vie pendant l’année scolaire, de faire valoir l’intérêt supérieur de l’enfant et de sa famille aux procédures d’expulsion et aux ruptures d’hébergement et de garantir la continuité de la scolarité de l’enfant avec l’ensemble des repères nécessaires à son épanouissement. Le nombre de  postes de médiatrices et médiateurs scolaires  financés par la Délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement (DIHAL)  et par des associations devrait également être pérennisé, augmenté notamment dans les territoires où le besoin est présent et surtout  leur travail avec les enfants et leurs familles et les établissements scolaires reconnu par l’Education nationale et l’ensemble des acteurs institutionnels (mairies, services sociaux, etc.). 

Nous demandons également la création d’un observatoire national de la non-scolarisation qui permettrait d’évaluer précisément le nombre d’enfants et d’adolescents non scolarisés et faciliterait la mise en place d’une politique nationale d’inclusion scolaire. 

À noter que la création en France d’un ministère dédié à l’enfance et à la jeunesse, tel que nous le demandons avec 24 autres organisations et collectifs dans le cadre de la Dynamique « De la Convention Aux Actes ! », permettrait de prendre en compte la multiplicité des problématiques rencontrés par ces enfants (logement, accès aux services essentiels parmi lesquels l’éducation, protection), de sortir de la logique de silo actuelle et de leur apporter une réponse globale et efficiente.

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